Voici une tribune de Philippe Bas, ancien ministre, sénateur UMP de la Manche, parue dans le Monde aujourd'hui, que je partage.
Il faut métamorphoser l'échec électoral par le renouveau de nos idées et de notre projet. Cherchons l'air pur des hauteurs ! Nous avons le temps pour nous.
Dans la nostalgie du pouvoir, l'UMP pourrait décider de camper sur des positions figées, sûre d'elle-même, sans état d'âme, en restant sur la même ligne politique qu'au cours des cinq dernières années, mais sans doute avec les mêmes résultats que ceux enregistrés à tous les scrutins depuis 2007.
A l'inverse, elle peut entreprendre de se reconstruire sur de nouvelles bases en profitant de la liberté que donne l'opposition, avec un nouveau projet, de nouveaux hommes, une nouvelle stratégie. Commençons par tirer les leçons de l'échec. Rassurons les Français sur notre capacité à répondre à une attente de justice qui ne doit pas sacrifier le dynamisme économique. Refusons toute complaisance à l'égard d'une extrême droite ennemie des libertés, négatrice des droits fondamentaux, propagandiste d'une politique économique et sociale d'appauvrissement des Français et d'affaiblissement de la France.
Il faut choisir la voie du renouveau, écouter et entendre les critiques des Français, admettre que toutes n'étaient pas injustifiées, en tirer sincèrement les conséquences. Si notre diplomatie de paix, notre politique européenne, notre gestion de la crise économique, nos grandes réformes sociales (retraites, RSA), toutes choses essentielles pour le pays, n'ont pas été sérieusement contestées, il n'en va pas de même de notre mode de gouvernement, qui fut parfois erratique. Les Français n'ont pas aimé les à-coups d'une pratique politique consistant à scruter les attentes de l'opinion avec une loupe grossissante pour y réagir dans l'instant par la surenchère législative. Ils n'ont pas été dupes d'un discours aussi ambigu qu'inefficace suggérant que tant de nos maux viendraient des étrangers, des musulmans, des assistés, des jeunes, de l'Europe, de la mondialisation... Le discours du clivage et de la stigmatisation met toujours le pouvoir face à ses propres impuissances. Inscrit dans la durée, ce discours ne peut servir que les forces de la contestation radicale. Ce n'est pas seulement une faiblesse politique et morale, c'est aussi une erreur tactique.
Il est urgent de réaffirmer nos fondamentaux, avec un projet de société qui repose sur notre confiance dans l'individu plutôt que sur nos attentes à l'égard de l'Etat, sur la croissance économique et l'esprit d'entreprise plutôt que sur l'accroissement des dépenses publiques et la hausse des impôts. Ce projet doit s'attacher à améliorer l'efficacité de notre modèle éducatif, de notre modèle social et de notre modèle d'intégration pour donner à chacun sa chance et ne laisser personne sur le bas-côté de la route. Notre vision du monde ne doit pas nous conduire à nous replier stupidement sur nos frontières mais à dynamiser l'Europe et à la rendre plus solidaire pour être forts dans la mondialisation, alors que seuls nous serions faibles. Cela va de soi, nos convictions républicaines doivent être inébranlables et insoupçonnables, respectueuses de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen comme des droits et devoirs politiques, économiques et sociaux énoncés par le préambule de la Constitution de 1946.
Enfin, il nous appartient de construire jour après jour une opposition appréciée des Français. Cela suppose d'être fermes sur nos grandes options, mais aussi de comprendre qu'on ne s'adresse pas à nos compatriotes comme à des militants à embrigader mais comme à des citoyens libres de tout engagement, ouverts et de bonne foi. Nos actes doivent plaider en ce sens. La gauche ne fera pas que de mauvaises choses. Ne soyons pas sectaires. Ne disons pas non à tout. Ce sera le meilleur moyen de démontrer que nous sommes ouverts et que nous ne nous cramponnons pas au passé. La page que nous allons écrire est vierge. Ne la souillons pas en nous montrant rigides, frileux ou immobiles.
Au contraire, ayons confiance en nous ! Plutôt que d'opter pour la démagogie, où nous trouverons toujours plus culottés que nous, choisissons de donner sa chance à la pédagogie. Au lieu de courir tour à tour après les marchands de bonheur et les prophètes de malheur, attachons-nous à répondre concrètement aux attentes de ceux qui se croient déclassés, menacés ou méprisés. Ramener au bercail les brebis égarées, oui. Les rejoindre pour bivouaquer avec elles en haut du précipice, non. Athènes et Rome nous rappellent que les démocraties sont mortelles. A chaque fois, c'est la même maladie dégénérative qui les tue : la démagogie, la surenchère populiste, la bêtise, l'intolérance et la haine. Ne croyons pas que cela soit impossible ici, au XXIème siècle, en pleine crise !
L'UMP sait où est son devoir. Le choix de son président sera pour elle une véritable chance de refondation. La question principale n'est pas celle des femmes et des hommes capables demain de prendre des responsabilités : nous n'en manquons pas. C'est la question du projet, de la ligne politique et des alliances. Ce grand rendez-vous démocratique interne à l'UMP est déterminant avant la préparation des élections de mi-mandat en 2014 et avant le choix d'un candidat à l'élection présidentielle par des primaires ouvertes. Il ne doit pas être manqué !
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