L'Europe risque de subir une deuxième crise budgétaire à long terme si les différents gouvernements n'effectuent pas de nouvelles réformes prenant en compte le vieillissement de la population. Mais, parallèlement à l'immense enjeu financier, cette adaptation au vieillissement doit être une priorité à toutes les échelles, y compris au niveau de nos villes.
Selon une étude de l'agence Fitch parue fin janvier, "Le coût du vieillissement: la deuxième crise budgétaire", "peu de pays sont exposés à un risque imminent. Cependant, sans réformes d'envergure de leurs systèmes de retraite, Fitch s'attend à abaisser au cours des dix prochaines années les notes des pays subissant les plus fortes pressions du fait du vieillissement ou présentant la plus grande urgence à agir. Les pays présentant un bon bilan en matière d'adoption de réformes pourraient bénéficier de davantage de marge de manoeuvre. Bien que la résolution de la crise budgétaire actuelle reste le facteur le plus important en ce qui concerne la notation de nombreuses économies avancées, sans réformes supplémentaires pour gérer l'impact à long terme du vieillissement, ces économies risquent une deuxième crise budgétaire à long terme. Faute de réformes pour augmenter la productivité du travail et/ou les taux de participation dans de nombreuses autres économies avancées, le vieillissement de la population pourrait se traduire par un recul du PIB à long terme, aggravant le défi budgétaire".
Il est intéressant de noter que l'Allemagne, l'un des pays les plus vieillissants d'Europe, n'est pas notée comme un pays à risque. Preuve qu'un certain nombre de réformes, concernant les retraites, mais aussi l'assurance dépendance, ont été effectuées à temps. La feuille de route française, nous la connaissons. Il s'agit d'abord de modifier en profondeur notre système de retraites pour faire face à un choc démographique dont il n'est pas possible de dire que nous l'aurions ignoré. Le passage rapide à la retraite à 65 ans, assorti d'une négociation sur la meilleure prise en compte de la pénibilité, est une nécessité. Mais nous ne pourrons continuer indéfiniment à augmenter l'âge de départ à la retraite en fonction du déséquilibre démographique : d'autres leviers devront être utilisés si nous restons dans le même système, le montant des pensions (difficile à toucher au-delà d'un certain niveau) ou celui des cotisations (qui ne doit pas entraver la compétitivité). Il sera donc nécessaire de refondre le système, vraisemblablement pour évoluer vers un système à points, transparent, avec une dose de capitalisation. S'agissant de la dépendance, les travaux sur la cinquième branche de la sécurité sociale doivent reprendre, autour d'une véritable réflexion sur ce qui relève de la solidarité nationale et ce qui peut être pris en charge par l'assurance privée. Le bilan du précédent quinquennat en matière de prise en charge de la dépendance, notamment celle liée à la maladie d'Alzheimer, est impressionnant. Il s'agit désormais d'imaginer un système de financement cohérent.
Mais le vieillissement n'est pas qu'une affaire financière, comme en témoigne la note du Centre d’analyse stratégique (CAS) présentée le 28 février 2013 « Vieillissement et espace urbain : comment la ville peut-elle accompagner le vieillissement en bonne santé des aînés ? » Il s’agit d’une contribution aux travaux préparatoires de la future loi sur l’autonomie annoncée par Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des Personnes âgées et de l’autonomie. La note s’appuie, en partie, sur une étude internationale réalisée par la société Icade (Caisse des dépôts), et met en avant quelques chiffres importants :
- 30 % des plus de 64 ans vivent dans les villes-centre, 40 % dans les banlieues ou les couronnes périurbaines et 25 % en zones rurales : cette situation a pour conséquence une prévalence importante de la maison individuelle
- les seniors vieillissent généralement où ils ont vécu : seuls 1,9 % des plus de 50 ans changent de domicile en France, contre 4,4 % au Danemark ou en Suède (mais 0,3 % en Grèce).
- L’accès aux services de proximité (commerces, services publics, pharmacie, services de soins) est inégal, un constat que nous posions déjà avec Elise Vouvet et Alexandre Brugère dans Citoyens des villes, citoyens des champs (Fayard, 2012) : les zones urbaines sont mieux dotées que les zones périurbaines et rurales la croissance du nombre de commerces de proximité est particulièrement dynamique dans les communes de plus de 10 000 habitants.
En partant de l’existant, et en dehors des normes d’accessibilité proprement dites, le CAS fait une première proposition aux communes et intercommunalités de mettre en place « une démarche dynamique de « micro-adaptations » » de la voirie, des transports, du mobilier urbain – adoucissement des bords de trottoirs, renforcement de l’éclairage, installation de bancs. Pour faciliter l’accès aux commerces et services, il recommande aussi (proposition n°2) de mobiliser les capacités de transports existantes par exemple en mutualisant les bus scolaires, les taxis… Lutter contre l’étalement urbain permettra de relever le double défi du vieillissement et de la transition énergétique, insiste le CAS. Sa troisième proposition est triple : promouvoir dans chaque ville un recensement des zones favorables au vieillissement ; concentrer dans ces zones les opérations d’adaptation des logements ; inciter à la densification de l’habitat. Pour des villes françaises amies des aînés - L’adaptation des villes au vieillissement est encore balbutiante en France, et pour impulser une dynamique, le CAS propose de s’inspirer de certains modèles étrangers et de soutenir la création d’une association des “villes françaises amies des aînés” regroupant, dans un premier temps, la dizaine de villes déjà inscrites dans la démarche OMS et associant des représentants des usagers. Il s’agit d’offrir un soutien méthodologique aux nouvelles villes candidates.
La ville de Courbevoie est déjà très active s'agissant de la prise en charge du vieillissement. Outre le centre hospitalier, dont l'implantation courbevoisienne constitue une référence pour tout le nord du département en matière de gérontologie et qui est actuellement en cours de rénovation et d'agrandissement, la ville accueille de nombreuses structures, des EHPAD, dont la capacité sera bientôt renforcée par les projets Marceau et Villa Médicis soutenus par la mairie, un accueil de jour, des services infirmiers à domicile, etc. La coordination est assurée par un CLIC de niveau 3, le CLIC Archipel, installé en face de l'hôpital. Mais la politique municipale conduite par Nicole Pernot, adjointe au maire chargé des Aînés, ne se préoccupe pas seulement des structures et des services, mais bien de toute l'adaptation de la ville au vieillissement, en liaison avec d'autres services de la ville, comme par exemple l'OPH, qui adapate ses logements. La ville est déjà dépositaire du label "Bien vieillir, vivre ensemble", au titre duquel elle organise de nombreuses conférences pour une vieillesse active et en bonne santé ; le conseil consultatif des seniors, qui sera bientôt installé, correspond également à cette volonté de donner aux personnes âgées toute leur place dans la Cité. Avec ces nombreuses actions, notre ville se trouve à la pointe d'une société où l'intergénérationnel est favorisé et où le vieillissement en ville est facilité. Mais nous savons combien les efforts à réaliser sont encore nombreux. C'est pourquoi il pourrait être intéressant de s'inspirer du rapport du CAS pour définir nos orientations municipales dans les années qui viennent.
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