Mon premier contact avec Roman von Unberg-Sternberg, dit le le Baron fou, remonte à la lecture de Corto Maltese en Sibérie. Et ce fut un choc : le chevalier mystique de la Mongolie, au service d'une cause désespérée, me séduisit immédiatement, avec sa devise "A la recherche de nos folies et de nos gloires", malgré sa manie de fusiller son entourage. Plus tard, il me fallut reconnaître que le Baron fou n'avait pas que des bons côtés - voire surtout de mauvais : son immense cruauté, son antisémitisme forcené, sa capacité à faire massacrer des populations entières, ne me le rendirent guère sympathique. Et je l'oubliais peu à peu, le retrouvant ponctuellement chez Albert Londres ou, plus récemment, dans le magnifique livre de Robert de Goulaine Les seigneurs de la mort.
Mais je dois reconnaitre que les barons baltes continuèrent à me fasciner. Une petite crise fut provoquée par la lecture du très beau Courlande, de Jean-Paul Kauffmann, qui m'amena au Coup de Grâce de Marguerite Yourcenar, ce poignant huis-clos amoureux et mortifère (avec une amitié amoureuse qui n'est pas loin de rappeler Les braises de Sandor Marai) puis vers les romans d'Eduard von Keyserling.
J'étais mûr pour renouer avec le Baron, avec la maturité et le recul suffisant pour juger le personnage historique. Mais aussi pour continuer à rêver de la Horde d'or. La passionnante biographie de Léonid Youzéfovitch, parue aux éditions des Syrtes, m'a permis d'enfin avoir une vision factuelle et réaliste de la vie de celui qui fut l'un des derniers empereurs de ces confins, khan des steppes, autant qu'un despote illuminé et sanguinaire. A tous ceux qu'un jour le Baron fou a fasciné, je recommande cette lecture.
Et quand je trouve le quotidien trop terne, je pense toujours à ces trains blindés filant dans l'immensité, à la recherche de rien d'autre que d'un rêve inatteignable, démesuré, ridicule.
Etonnant car c'est exactement aussi mon cas. J'ai rencontré Ungern ainsi. Mais je n'en dis pas plus pour l'instant. D'ailleurs ma Nouvelle du Jour évoque Corto.
Rédigé par : Rémy D.-Wiedemann | 06/08/2012 à 23:34