Rédigé à 17:06 dans Actualité, Coup de coeur , Courbevoie | Lien permanent | Commentaires (0)
Robert Castel est certainement l'un des sociologues dont l'analyse m'a le plus marqué, et dont je recommande sans cesse la lecture pour ses analyses à la fois précises, argumentées et lumineuses sur les transformations de la société. Des Métamorphoses de la question sociale à La montée des incertitudes c'est toute la question du rapport entre évolution du salariat et "désaffiliation sociale" (ou "désiccation du lien social") qui est traitée. Pour Castel, c’est dans la fragilisation du travail salarié, auquel est attaché tout un système de garanties, de protections et de statuts établis durant plus d’un siècle, que l’on trouve les causes actuelles de l’exclusion : « Exclusion ou désaffiliation sont l’effet d’un ébranlement général dont les causes se trouvent dans le travail et son mode d’organisation actuel. » Des analyses passionnantes, à lire et à relire, et à méditer pour l'action politique, à débattre aussi, mais toujours stimulantes.
Voici quelques extraits d'une interview de Robert Castel menée en 2009 par Jean-Marie Durand pour Les Inrocks.
Votre nouveau livre, La Montée des incertitudes, approfondit votre travail entamé en 1995 dans Les Métamorphoses de la question sociale. Avez-vous l’impression d’achever votre réflexion dans ce domaine ?
Non, c’est un processus inachevé. J’ai voulu, quinze ans après Les Métamorphoses…, mesurer l’évolution des transformations dans l’organisation du travail, des protections sociales et du statut de l’individu depuis les années 70. Car ces transformations remettent en cause le statut de l’individu moderne, ou en tout cas nombre de ces individus que j’appelle des “individus par défaut”, auxquels font défaut les conditions de base pour se réaliser avec un minimum d’indépendance sociale. La dégradation de ce statut de l’individu me paraît profondément liée à cet effritement de la condition salariale, avec sa stabilité, ses droits, ses protections.
[...]
La dérégulation du travail est, selon vous, à la base de cette transformation.
C’est l’épicentre. A la subordination salariale ont longtemps été associés des protections et des droits forts. Aujourd’hui, on observe l’effritement de ces systèmes de sécurisation du travail sous la poussée de la logique du nouveau capitalisme : une logique de “décollectivisation”. On est dans le temps des fragmentations. Les travailleurs sont appelés à se responsabiliser, à prendre des initiatives, dans une situation de concurrence du tous contre tous. La dégradation du statut de l’emploi donne lieu à la progression de formes d’activité en deçà de l’emploi, qui sont mal protégées, mal payées et qui institutionnalisent le “précariat”. Il y avait une vieille expression populaire au XIXe siècle : “Vivre au jour la journée”. C’était le fait de la majorité des travailleurs à l’époque. A nouveau, un grand nombre de gens vivent au jour la journée, ne savent pas de quoi demain sera fait. C’est une remontée de l’insécurité sociale.
Rédigé à 14:56 dans Livres | Lien permanent | Commentaires (2)
Vous pouvez télécharger ici le programme du Festival Atmosphères de Courbevoie, qui vous réserve cette année encore des moments passionnants, sur scène, sur écran, et en débats : Téléchargement FESTIVAL_ATMOSPHÈRES_PROGRAMME_DU_2_AU_7_AVRIL_2013[1].
Rédigé à 12:01 dans Courbevoie | Lien permanent | Commentaires (1)
Lors d’un déplacement à Champs-sur-Marne, le 6 mars, le Premier ministre a présenté la feuille de route du Gouvernement pour le Nouveau Grand Paris. Je vous en propose un compte-rendu factuel, une analyse politique aussi bien qu'une réflexion sur les impacts pour notre ville.
1. Les faits
Le Premier ministre a tout d’abord affirmé que l’amélioration du réseau existant et la réalisation du Grand Paris Express se feraient simultanément.
S’agissant de l’amélioration du réseau existant, un plan de mobilisation de 12 milliards d’euros a été prévu, entre la Région Ile-de-France, l’Etat, les départements et le STIF. Il doit permettre le prolongement de lignes de métro et de RER, la modernisation du RER, l’amélioration du Transilien… Ces projets seront menés à terme grâce à un financement sécurisé à échéance 2017.
S’agissant du Grand Paris Express, le rapport Alauzet avait réévalué le coût du projet à 29,9 Md€. Ce projet a été modifié afin d’en ramener le coût à environ 27 Md€, notamment en retravaillant la configuration technique des futures lignes. Le Grand Paris Express sera constitué de trois projets interconnectés aux lignes existantes :
Enfin, une liaison directe entre l’Aéroport Roissy-Charles de Gaulle et la gare de l’Est est en projet. Ce projet possède son modèle économique propre et devra être financé par les recettes de ses utilisateurs et des passagers aériens. Le Ministère chargé des Transports doit étudier de nouveaux montages pour ce projet, en y impliquant RFF et ADP. Le gouvernement décidera avant l’été du lancement d’une nouvelle procédure de consultation en en tirant tous les enseignements.
Dans le cadre du projet de loi décentralisation, des dispositions renforçant les relations entre le STIF et la Société du Grand Paris devront être mises en place. Le STIF sera l’autorité organisatrice des transports de plein exercice, compétente sur tous les réseaux.
Le calendrier
La réalisation intégrale de ces projets est prévu d’ici 2030, avec une retard de cinq ans sur le projet initial, comme le suggérait le rapport Auzannet. Les lignes seront lancées en parallèle, les tronçons s’enchaînant les uns aux autres d’une manière continue, a affirmé le Premier ministre.
Le financement
7 Md€ devront être engagés d’ici 2017 pour les opérations du plan de mobilisation, et 24,575 md€ pour la réalisation des lignes sous maîtrise d’ouvrage de la Société du grand Paris.
Afin de sécuriser le financement des investissements du Grand Paris Express, sans accroître à court terme les prélèvements obligatoires sur les entreprises, 5 mesures ont été décidées :
La gouvernance
Il faut rappeler que, parallèlement à ces annonces sur le Grand Paris, a été finalisé le projet de loi sur la décentralisation qui prévoit la création d'une métropole parisienne. Cette métropole de Paris est une structure intercommunale, épousant les frontières de l'unité urbaine de Paris (selon l'INSEE, celle-ci comprend 412 communes rassemblant 10 millions d'habitants - elle recouvre Paris et les départements de la Petite couronne, ainsi qu'une partie des communes de Grande couronne : 52 des 514 communes de Seine-et-Marne, 90 des 262 communes des Yvelines, 82 des 196 communes de l'Essonne, 64 des 185 communes du Val d'Oise). Sa naissance est prévue par le projet de loi de décentralisation qui sera présenté en conseil des ministres le 10 avril prochain, pour le 1er janvier 2016. Les compétences liées au logement, à l'environnement et à l'aménagement doivent être transférées à la métropole de Paris. La métropole sera administrée par un conseil composé du maire de Paris et des présidents des intercommunalités composant le reste de la métropole. Les communes concernées devront se regrouper par groupe d'au moins 300 000 habitants pour les communes de petite couronne et d'au moins 200 000 habitants pour les communes de grande couronne, pour un total d'environ 25 intercommunalités. Elle est organisée par l’article 77 du projet de loi décentralisation.
Bien évidemment, la création de cette métropole sera débattue au Parlement, mais on peut déjà s'étonner du chevauchement avec la région, et s'interroger sur ses limites. Sans compter que le lien logement-emploi-transports est désormais bien établi et que ces compétences vont se trouver éparpillées. Enfin, le texte pourrait avoir des conséquences pour nos intercommunalités : Seine-Défense ne compte que 140 000 habitants, il faudrait donc élargir le périmètre de notre communauté d'agglomération...
2. L'analyse politique
Il convient tout d'abord de noter que le Gouvernement actuel reprend le projet du Gouvernement précédent, en en diminuant l'ambition et en séparant la question du réseau de celle, essentielle, des pôles de développement du Grand Paris. Le Grand Paris n'est pas né en 2013, comme on tente de nous le faire croire, mais bien en 2008, et sa concrétisation a d'ores et déjà commencé. Au-delà d'ajustements financiers qui étaient nécessaires, le Plan proposé par le Gouvernement marque plutôt un recul d'ambition.
Concernant les réactions politiques, voici celle de Valérie Pécresse, présidente du groupe Mouvement populaire au Conseil régional d'Ile-de-France, qui dit avoir accueilli avec "déception et inquiétude" les annonces de Jean-Marc Ayrault sur le Grand Paris. Voici les extraits de son communiqué :
"Déception car, malgré l’engagement de réaliser les 72 gares et les 200 kilomètres de réseau, la grande couronne, oubliée de la « Métropole de Paris », est de nouveau le parent pauvre du gouvernement. En renonçant à un réseau homogène de grande capacité au profit d’une succession de tronçons aux dimensionnements réduits, le gouvernement abandonne la vision initiale du projet pour un Grand Paris au rabais limité aux contours de la première couronne. Au métro automatique de grande capacité, le gouvernement préfère, pour près d’un tiers du réseau, des solutions de transport plus légères et beaucoup moins performantes. Résultat : des temps de parcours plus longs pour les Franciliens les plus éloignés de Paris et un objectif de 70 000 logements neufs et de 30 000 nouveaux emplois par an très difficile à atteindre.
Grande inquiétude enfin car après 10 mois de tergiversations, le Premier ministre n’a toujours pas proposé de plan de financement crédible. Jean-Marc Ayrault réussit même le tour de force d’annoncer une nouvelle augmentation des impôts sans assurer l’avenir du projet. Qui peut croire qu’une hausse de la taxe sur les bureaux et des amendes de circulation, même massive, permettra de récolter les 6,5 milliards d’euros de ressources nouvelles nécessaires pour la réalisation du réseau ?"
Valérie Pécresse rappelle que le 22 février dernier, elle a adressé, avec 49 parlementaires franciliens, au Premier ministre un appel proposant des solutions innovantes pour financer l’intégralité du Grand Paris dans sa version initiale : allongement de la durée d’amortissement des prêts, mobilisation de l’épargne réglementée et des ressources issues de l’augmentation programmée de la TVA sur les transports franciliens, cession de certaines participations non stratégiques de l’Etat dans des entreprises cotées.
Autre avis intéressant, celui des "Enfants du Grand Paris", un groupe d'experts qui a participé au projet depuis sa création. Ils publient un document passionnant, riche en propositions, que je vous invite à lire en entier http://static.lexpress.fr/pub/express%20yourself/GrandParis.pdf. Leurs propositions portent sur trois domaines dont la complémentarité est évidente et qui doivent se soutenir l'un l'autre. Premier volet : "Logement et égalité du territoire". Il n'y aura pas de développement sans attaquer résolument la crise du logement en Ile-de-France. Pour cela il faut d'abord et avant tout traiter l'urbanisme à l'échelle de l'intercommunalité, y compris les permis de construire. Ils proposent aussi de mobiliser le foncier en s'appuyant sur les outils qui existent déjà pour relancer l'urbanisme de projet, tout en mettant en place une péréquation financière au bénéfice des villes qui prennent le risque de construire du logement (une proposition soutenue dans le livre que j'ai co-écrit avec Elise Vouvet et Alexandre Brugère, Citoyens des villes, Citoyens des champs). Pour eux, il faut simplifier les procédures et notamment limiter les conséquences des détournements du droit et des procédures abusives. Deuxième volet : "Gouvernance". Il faut saisir le moment historique pour revoir en profondeur la gouvernance sans quoi même les projets les mieux conçus et les plus partagés s'échoueront inévitablement sur les écueils des projets à long terme. Pour eux, il faut faire évoluer le pouvoir des communes de l'unité urbaine vers un statut de "mairie d'arrondissement" au sein de communautés fortes d'environ 500 000 habitants. Il faut créer une instance de pilotage faîtière de ces communautés. Il faut surtout et dans le même temps supprimer les conseils généraux de l'Île-de-France dont les compétences sont redistribués vers la communauté, la région, la ville. Sans un transfert clair de compétences, de moyens et de personnels, l'ajout d'une ou deux couches aux mille-feuilles institutionnel ne pourrait être que contre-productif à court terme. Troisième volet : "Un réseau de transport structurant ". Ils proposaient des économies importantes, d'environ 5 milliards d'euros, sur le réseau sans modifier le schéma d'ensemble pour ne pas perdre de temps, qui n'ont pas toutes été entendues, de même que leur proposition de placer les gares TGV en parallèle dans de nouvelles centralités. Autre proposition importante, à rebours de la décision prise par le Gouvernement, celle d'engager immédiatement et en priorité nationale les lignes qui ont le plus d'impact sur la création d'emplois directs et sur le logement., et d'étudier en parallèle l'association des PME, des centres de recherche, des circuits d'insertion pour profiter à plein de l'effet de relance et d'entraînement de ce projet sur l'emploi et l'activité. Malheureusement, comme le montre le report de la ligne passant à La Défense et allant vers Roissy, cette logique économique n'a pas été provilégiée.
3. Les impacts pour notre ville
Difficile de ne pas éprouver une intense déception quant au report de dix ans du tronçon qui concerne notre territoire, avec les gares de La Défense et Bécon-les-Bruyères, prévues pour une ouverture en 2020, repoussées à 2030.
Si nous ne pouvons que nous réjouir de cette continuité de l’Etat dans ses engagements, et du respect du schéma initial de transports, nous, élus de la boucle Nord des Hauts-de-Seine, avons été extrêmement surpris par le nouveau phasage pour la construction des différents réseaux.
En effet, que ce soit dans le schéma initial ou dans les schémas préconisés par le rapport Auzannet commandé par le même Gouvernement, la ligne de métro reliant La Défense à Saint-Denis (et au-delà à Roissy) a toujours été inscrites parmi les priorités, avec un achèvement prévu à l’horizon 2020. Les études techniques ont commencé, les réunions de concertation publiques se sont engagées, les communes ont travaillé sur l’aménagement de nouveaux quartiers, les entreprises ont prévu leur installation près de ces pôles, et celles qui y étaient déjà ont vu la perspective d’une meilleure desserte se concrétiser.
Aujourd’hui, le tronçon Nanterre-Le Bourget figure parmi les derniers réalisés, à l’horizon 2030. Cette décision remet en cause bien des perspectives pour nos villes, nos habitants, nos entreprises. Elle pose également la question de l’attractivité du pôle de La Défense, dont, faut-il le rappeler, le rôle de locomotive pour toute l’économie francilienne n’est plus à démontrer.
Certes, La Défense va bénéficier du prolongement du RER E, qui donnera un peu d’air à un quartier aux transports en commun saturés. Mais cela ne résout en rien la problématique de la liaison La Défense-Saint-Denis-Roissy, dont l’intérêt économique a été mainte et mainte fois souligné. L’avenir du quartier d’affaires, mais aussi des pôles économiques qui se sont développés autour de la gare de Bécon-les-Bruyères, et plus loin à Gennevilliers, dépend en partie de la capacité des transports. Qu’allons-nous expliquer aux salariés de la Coface, de l’Inpi, d’IBM, de GDF-Suez, qui trouvaient déjà que l’horizon 2020 était lointain pour mettre fin à la saturation de la gare Transilien de Bécon ? Dans la logique économique, cette liaison était prioritaire. Dans les agendas des spécialistes des transports, elle l’était également. Dans la perspective d’augmenter l’offre de logements, elle était utile pour le développement de nouveaux quartiers anticipés par les municipalités.
Alors nous nous interrogeons sur les motivations qui ont pu conduire le Gouvernement à inverser ce calendrier. Le rééquilibrage à l’Est ? Peut-être, mais rien n’empêchait de progresser en parallèle sur les deux tableaux. La cohérence du schéma d’ensemble ? On peut en douter, tant ce maillon était décrit comme central dans tous les travaux précédents. Alors, quelle en est la raison ?
Nous n’osons imaginer que ce soit l’idéologie qui seule a conduit cette décision. Cette idéologie qui considère que la banlieue ouest est peuplée de riches et peut bien attendre, alors qu’elle comporte aussi sa part de territoires délaissés et de populations paupérisées, qui ont grand besoin du développement qu’induit ce nouveau réseau de transports. Cette idéologie qui considère La Défense comme une concentration de richesses insupportables qu’il faudrait faire éclater. Faut-il rappeler qu’aujourd’hui la concurrence se situent entre des villes européennes qui toutes possèdent un tel quartier d’affaires ? Faut-il rappeler que La Défense profite à l’ensemble de la métropole francilienne, et à l’Est, avec des sociétés qui y implantent leurs sièges, tandis qu’elles installent d’autres fonctions à Val de Fontenay ou Marne-la-Vallée par exemple ? Faut-il rappeler que les recettes fiscales de La Défense alimentent et la solidarité nationale, et la solidarité régionale ? Laurent Davezies a publié un livre éclairant, La crise qui vient, sur la manière dont la production de richesses sur un territoire profitait très largement à d’autres. C’est une leçon. A casser les moteurs territoriaux de la croissance, on risque, non pas de rééquilibrer les territoires, mais de prolonger la crise dans tout le pays.
Nous espérons donc que cette question essentielle du calendrier de réalisation des différents tronçons pourra être soumise à débat, et que la relance de notre économie, que vous, trouvera son inscription territoriale dans la réalisation de ce Grand Paris que nous appelons de nos vœux. C'est un enjeu essentiel pour notre territoire, qui pourrait remettre en cause des implantations économique, le réaménagement urbain de certains quartiers comme la zone des Bruyères, et pénaliser la vie quotidienne de nos habitants. Nous continuerons à être présents dans ce débat.
Rédigé à 08:39 dans Actualité, Courbevoie, Politique | Lien permanent | Commentaires (1)
L'élection d'un pape sud-américain, jésuite, ayant pris le nom de François, constitue à n'en point douter une belle nouvelle pour une Eglise engagée auprès des plus fragiles, et exigeante sur le plan intellectuel et spirituel. A cette occasion, je vous propose un texte sur l'idée de mission chez Saint Ignace de Loyola, Fondateur de la Compagnie de Jésus (rédigé à l'origine pour le Sénevé en 2003).
L'ordre des Jésuites semble indissociable de l'idée de mission. Pourtant, l'objet de cet article ne sera pas de relater les missions jésuites, mais plutôt de s'interroger sur l'idée de mission dans la pensée du fondateur de l'ordre, Saint Ignace, et de voir comment cette pensée a donné naissance à la vocation missionnaire de la Compagnie de Jésus.
Les vocations de Saint Ignace
Un des thèmes récurrents de l'Autobiographie de Saint Ignace est celui de l'enseignement des âmes. Comme Ignace lui-même a été enseigné par Dieu, qui l'inspire notamment dans la rédaction des Exercices spirituels, en le traitant « de la même manière qu'un maître d'école traite un enfant », il a la mission d'à son tour enseigner les âmes pour leur salut. Dès sa conversion, il se met à parler à son entourage « des choses de Dieu, pour le profit de leur âme »1. Cette volonté d'aider les âmes est présente dans toutes les actions du Pélerin (ainsi qu'Ignace se désigne lui-même), qui la met en pratique dans toutes les villes qu'il traverse. Ce devoir d'aider son prochain passe notamment par l'insistance mise sur les vices et les 7vertus, qui doit permettre le salut des âmes et la conversion des pécheurs. Ceci explique le rôle central des Exercices spirituels, écrits à Manrèse grâce à l'inspiration divine, avant même qu'Ignace n'étudie la théologie, ce qui lui vaudra la méfiance des autorités ecclésiastiques. En effet, les Exercices sont donnés par Ignace pour convertir les pécheurs et conduire à la perfection ; comme l'a écrit Saint François de Sales, « Les Exercices spirituels ont converti plus de pécheurs qu'ils ne contiennent de lettres. »
Cette mission s'accompagne d'une autre constante de la pensée d'Ignace : la nécessité de se laisser guider par l'intention de Dieu, de voir Dieu à l'oeuvre dans toutes les circonstances de la vie. Que le Pèlerin échappe à la maladie, aux périls, qu'il soit emprisonné, calomnié, il y voit la volonté de Dieu, à laquelle il faut se fier. Ignace se laisse envoyer en mission dans toutes contrées, sûr que Dieu se tient à l'intention qui l'habite : il est l'instrument de Sa plus grande gloire et n'enseigne les âmes que parce qu'il est sûr de réaliser ainsi le dessein du Seigneur. La mission d'Ignace se conçoit donc comme la conséquence de la volonté de Dieu telle qu'elle lui apparaît à travers les nombreux signes qui lui sont offerts, notamment les visions et extases mystiques.
Enfin, le fondateur de la Compagnie de Jésus se veut aussi le signe de la présence du Christ dans le monde. Le mot de compagnie peut se comprendre aussi au sens de la proximité, notamment si l'on se réfère à la vision dite de la Storta où « Dieu le Père le mettait avec le Christ »2 : par l'humilité, la pauvreté, l'enseignement, Ignace veut se rapprocher du mode de vie du Christ. La Compagnie de Jésus se veut le signe de la présence du Christ dans le monde.
Ces conceptions de la mission vont être utilisées pour fonder la Compagnie de Jésus : les dimensions d'enseignement et de conversion sont maintenues, tandis que l'idée de disponibilité aux intentions de Dieu devient l'acceptation de l'envoi aux quatre coins du monde.
La bulle pontificale de Paul III3, édictée en 1540, concrétise l'idée de mission d'Ignace, en fondant l'Ordre. Aider les âmes devient dans le texte papal « aider à l'avancement des âmes dans la vie et la doctrine chrétienne », but assigné à la compagnie. L'accent est mis principalement sur la « propagation de la Foi aux enfants et à ceux qui ne sont pas instruits dans la Foi », ce qui donne à l'ordre une triple vocation : envers la jeunesse, envers les habitants des Nouveaux Mondes, mais aussi envers les protestants, considérés à cette époque comme "hérétiques" et donc non instruits dans la Foi. L'éducation et l'activité missionnaire qui sont les deux ministères principaux des Jésuites découlent donc de la conception de la mission d'Ignace : ils détiennent le charisme d'aider les âmes et doivent donc se concentrer sur ceux qui n'ont pas encore été sensibilisés aux paroles du Christ ; cet enseignement permettra le salut des âmes, la conversion des coeurs. Ce qui chez Ignace était la volonté de suivre l'intention de Dieu devient, dans ce texte fondateur, l'idée d'une disponibilité aux desseins de Dieu. La Compagnie se place sous les ordres du Pape et ses membres peuvent donc être envoyés partout, « chez les Turcs ou tous les autres infidèles, même dans les Indes, soit vers les hérétiques et les schismatiques, ou vers les fidèles quelconques ». Cette idée de disponibilité à la mission confiée par Dieu s'accompagne comme dans la pensée ignacienne de la volonté de faire de celle-ci et de son succès le signe de la présence et de la gloire de Dieu sur terre, ce qui explique la devise de la Compagnie « Ad majorem Dei gloriam ».
Enfin, le nom même choisi par Ignace pour nommer l'Ordre témoigne de l'engagement militant de celui-ci au sein du monde. En plus de la dimension de proximité, ce nom de compagnie fait avant tout référence au domaine militaire, à une « milice du Christ » comme il est inscrit dans le texte de Paul III. Les premiers compagnons, rassemblés après le serment de Montmartre en 1534, répondaient à ceux qui les interrogeaient : « Nous sommes réunis sous la bannière de Jésus-Christ pour combattre les hérésies et les vices : nous formons donc la Compagnie de Jésus. »
Ainsi, les conceptions ignaciennes de la mission, fondées sur la volonté d'enseigner les choses de Dieu pour le salut des âmes ont donné naissance à la vocation missionnaire des Jésuites.
Sans aller jusqu'à désigner Saint Ignace, ainsi que le fait J. Crétineau-Joly, comme le « Christophe Colomb de la sanctification »4, il convient de voir en lui le continuateur des apôtres. Le Père Nadal, un des premiers compagnons, souligne cet aspect par cette assertion : « Paul représente notre ministère ». John O'Malley parle d'un modèle apostolique (« apostolic pattern »5), ce qui signifie à la fois la filiation avec un modèle ancien (celui des premiers apôtres), mais aussi l'originalité de la conception ignacienne de la conversion par la persuasion (notamment grâce au formidable outil que représentent les Exercices Spirituels). L'idée de mission va de pair avec cette conception de l'apostolat ; dans les Constitutions, l'exigence apostolique de la communauté est définie en ces termes : « voyager à travers le monde et vivre n'importe où il y a espoir de rendre grand service à Dieu et aider les âmes ».
Les premiers Jésuites sont aussi animés par un esprit militaire qui fortifie leur volonté apostolique. Le P. Nadal décrit les compagnons comme « Militare Deo sub vexillo crucis », des soldats de Dieu sous la bannière de la croix. Comme le montre J. Crétineau-Joly, Ignace considère le Christ comme un général combattant les ennemis de la gloire divine et appelant tous les hommes à se ranger sous son drapeau, ce qui explique son désir de former une armée dont Jésus serait « le chef et l'empereur »6. J. O'Malley nuance cette approche du dessein ignacien en insistant sur la volonté, par ce vocable militaire, de faire référence aux grands ordres médiévaux, et de revenir à une pureté première de l'engagement aux côtés du Christ, dans une période de corruption des ordres religieux traditionnels.
Cette approche donne aux premiers Jésuites un style missionnaire novateur. L'importance prise par la suite par les missions ne doit pas faire oublier le rôle joué par la Compagnie dans la Contre-Réforme, ou encore dans l'éducation (comme le rappelle le P. Polanco, chaque jésuite doit prendre part à la mission d'éducation). En ce qui concerne les missions lointaines, le premier grand jésuite missionnaire, Saint François-Xavier, est envoyé par le roi du Portugal Jean III aux Indes, à Goa. Cette date marque le début de l'essor missionnaire de la Compagnie, qui connaît son apogée au XVIIème siècle. Leur méthode se démarque à l'origine de celle des autres ordres missionnaires de l'époque, par la volonté de persuader, l'effort de discussion avec les indigènes (François-Xavier apprend ainsi les langues vernaculaires), la volonté de sensibiliser au message du Christ plutôt que de l'imposer sans en faire comprendre le sens. Certes, la méthode des compagnons peut être qualifiée d'« aggressive and apostolic »7, mais la dimension d'adaptation culturelle est aussi présente, dans la continuité de l'idée d'avancement des âmes par la révélation des « choses de Dieu ».
Un autre trait de cette activité réside dans l'intérêt porté par les Jésuites aux élites. Cette pratique est la conséquence de la volonté de faire progresser la cause de la Foi le plus rapidement possible. S'appuyer sur les élites revient à agir « Ad majorem Dei gloriam »8. De même la Compagnie cherchera souvent à jouer un rôle dans le gouvernement des âmes des élites européennes, notamment grâce à la présence de nombreux confesseurs jésuites dans les Cours. Ainsi ne faut-il peut-être voir dans la casuistique qu'une approche de l'avancement des âmes par la persuasion...
L'idée de mission dans la pensée du fondateur de la Compagnie de Jésus éclaire d'un jour nouveau l'activité missionnaire de l'Ordre, et sa place relative par rapport aux autres ministères, liées entre eux par ces deux idées centrales de la pensée ignacienne : d'une part, la nécessité d'aider les âmes à trouver le chemin vers le Christ, grâce au modèle de conversion et de persuasion que représentent les Exercices spirituels, et d'autre part, la soumission aux desseins de Dieu, par la disponibilité à l'envoi - particulièrement vers les populations que met en avant la bulle pontificale : les enfants et ceux qui ne sont pas encore instruits dans la Foi. Ces deux impératifs ne sont que les deux faces d'un même combat pour la plus grande gloire de Dieu et de Son fils Jésus.
Notes
Rédigé à 17:26 dans Actualité, Religion | Lien permanent | Commentaires (2)
L'Europe risque de subir une deuxième crise budgétaire à long terme si les différents gouvernements n'effectuent pas de nouvelles réformes prenant en compte le vieillissement de la population. Mais, parallèlement à l'immense enjeu financier, cette adaptation au vieillissement doit être une priorité à toutes les échelles, y compris au niveau de nos villes.
Selon une étude de l'agence Fitch parue fin janvier, "Le coût du vieillissement: la deuxième crise budgétaire", "peu de pays sont exposés à un risque imminent. Cependant, sans réformes d'envergure de leurs systèmes de retraite, Fitch s'attend à abaisser au cours des dix prochaines années les notes des pays subissant les plus fortes pressions du fait du vieillissement ou présentant la plus grande urgence à agir. Les pays présentant un bon bilan en matière d'adoption de réformes pourraient bénéficier de davantage de marge de manoeuvre. Bien que la résolution de la crise budgétaire actuelle reste le facteur le plus important en ce qui concerne la notation de nombreuses économies avancées, sans réformes supplémentaires pour gérer l'impact à long terme du vieillissement, ces économies risquent une deuxième crise budgétaire à long terme. Faute de réformes pour augmenter la productivité du travail et/ou les taux de participation dans de nombreuses autres économies avancées, le vieillissement de la population pourrait se traduire par un recul du PIB à long terme, aggravant le défi budgétaire".
Il est intéressant de noter que l'Allemagne, l'un des pays les plus vieillissants d'Europe, n'est pas notée comme un pays à risque. Preuve qu'un certain nombre de réformes, concernant les retraites, mais aussi l'assurance dépendance, ont été effectuées à temps. La feuille de route française, nous la connaissons. Il s'agit d'abord de modifier en profondeur notre système de retraites pour faire face à un choc démographique dont il n'est pas possible de dire que nous l'aurions ignoré. Le passage rapide à la retraite à 65 ans, assorti d'une négociation sur la meilleure prise en compte de la pénibilité, est une nécessité. Mais nous ne pourrons continuer indéfiniment à augmenter l'âge de départ à la retraite en fonction du déséquilibre démographique : d'autres leviers devront être utilisés si nous restons dans le même système, le montant des pensions (difficile à toucher au-delà d'un certain niveau) ou celui des cotisations (qui ne doit pas entraver la compétitivité). Il sera donc nécessaire de refondre le système, vraisemblablement pour évoluer vers un système à points, transparent, avec une dose de capitalisation. S'agissant de la dépendance, les travaux sur la cinquième branche de la sécurité sociale doivent reprendre, autour d'une véritable réflexion sur ce qui relève de la solidarité nationale et ce qui peut être pris en charge par l'assurance privée. Le bilan du précédent quinquennat en matière de prise en charge de la dépendance, notamment celle liée à la maladie d'Alzheimer, est impressionnant. Il s'agit désormais d'imaginer un système de financement cohérent.
Mais le vieillissement n'est pas qu'une affaire financière, comme en témoigne la note du Centre d’analyse stratégique (CAS) présentée le 28 février 2013 « Vieillissement et espace urbain : comment la ville peut-elle accompagner le vieillissement en bonne santé des aînés ? » Il s’agit d’une contribution aux travaux préparatoires de la future loi sur l’autonomie annoncée par Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des Personnes âgées et de l’autonomie. La note s’appuie, en partie, sur une étude internationale réalisée par la société Icade (Caisse des dépôts), et met en avant quelques chiffres importants :
En partant de l’existant, et en dehors des normes d’accessibilité proprement dites, le CAS fait une première proposition aux communes et intercommunalités de mettre en place « une démarche dynamique de « micro-adaptations » » de la voirie, des transports, du mobilier urbain – adoucissement des bords de trottoirs, renforcement de l’éclairage, installation de bancs. Pour faciliter l’accès aux commerces et services, il recommande aussi (proposition n°2) de mobiliser les capacités de transports existantes par exemple en mutualisant les bus scolaires, les taxis… Lutter contre l’étalement urbain permettra de relever le double défi du vieillissement et de la transition énergétique, insiste le CAS. Sa troisième proposition est triple : promouvoir dans chaque ville un recensement des zones favorables au vieillissement ; concentrer dans ces zones les opérations d’adaptation des logements ; inciter à la densification de l’habitat. Pour des villes françaises amies des aînés - L’adaptation des villes au vieillissement est encore balbutiante en France, et pour impulser une dynamique, le CAS propose de s’inspirer de certains modèles étrangers et de soutenir la création d’une association des “villes françaises amies des aînés” regroupant, dans un premier temps, la dizaine de villes déjà inscrites dans la démarche OMS et associant des représentants des usagers. Il s’agit d’offrir un soutien méthodologique aux nouvelles villes candidates.
La ville de Courbevoie est déjà très active s'agissant de la prise en charge du vieillissement. Outre le centre hospitalier, dont l'implantation courbevoisienne constitue une référence pour tout le nord du département en matière de gérontologie et qui est actuellement en cours de rénovation et d'agrandissement, la ville accueille de nombreuses structures, des EHPAD, dont la capacité sera bientôt renforcée par les projets Marceau et Villa Médicis soutenus par la mairie, un accueil de jour, des services infirmiers à domicile, etc. La coordination est assurée par un CLIC de niveau 3, le CLIC Archipel, installé en face de l'hôpital. Mais la politique municipale conduite par Nicole Pernot, adjointe au maire chargé des Aînés, ne se préoccupe pas seulement des structures et des services, mais bien de toute l'adaptation de la ville au vieillissement, en liaison avec d'autres services de la ville, comme par exemple l'OPH, qui adapate ses logements. La ville est déjà dépositaire du label "Bien vieillir, vivre ensemble", au titre duquel elle organise de nombreuses conférences pour une vieillesse active et en bonne santé ; le conseil consultatif des seniors, qui sera bientôt installé, correspond également à cette volonté de donner aux personnes âgées toute leur place dans la Cité. Avec ces nombreuses actions, notre ville se trouve à la pointe d'une société où l'intergénérationnel est favorisé et où le vieillissement en ville est facilité. Mais nous savons combien les efforts à réaliser sont encore nombreux. C'est pourquoi il pourrait être intéressant de s'inspirer du rapport du CAS pour définir nos orientations municipales dans les années qui viennent.
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Encore trois jours de suspense. Mercredi, le Premier ministre prononcera son "discours historique du 6 mars" sur le Grand Paris. Devant un parterre de 700 élus et décideurs économiques franciliens, Jean-Marc Ayrault dévoilera son projet en matière de gouvernance et donnera le coup d’envoi au "nouveau" Grand Paris Express (GPE). Le lieu du rendez-vous, la cité Descartes, à Noisy-Champs, à cheval sur le 93 et le 77, ne doit rien au hasard : le premier tronçon du GPE doit précisément relier, dès 2020, le Pont-de-Sèvres à Noisy- Champs, au sud de la ligne Rouge. "Les annonces du Premier ministre correspondront peu ou prou aux propositions de Cécile Duflot [la ministre EELV en charge du Grand Paris]", indique le député Alexis Bachelay (PS), corapporteur de la mission de suivi de la loi sur le Grand Paris. "Les travaux devraient commencer dans deux ans, de manière à peu près simultanée, pour une livraison complète en 2030 ou 2032. Tout cela est acté", ajoute Yves Albarello (UMP), l’autre corapporteur. Les arbitrages définitifs de Matignon seront pris in extremis. Les négociations vont bon train entre Matignon, Bercy, l’équipe de Cécile Duflot et celle de Jean-Paul Huchon (PS) à la région. D’où la fébrilité des différents acteurs du dossier. "Chaque jour, il faut revoir la copie", soupire un membre de cabinet. "Ça change toutes les cinq minutes", déplore un autre. Première certitude cependant : Jean-Marc Ayrault confirmera une "fusion" entre le GPE (30 milliards d’euros pour 200 km de métro automatique) et le plan de mobilisation, c’est-à-dire l’amélioration des RER existants (7 milliards d’euros sur la période 2014-2018).Autre point acquis : le calendrier est repoussé d’au moins cinq ans. "Même riche à milliards, l’objectif initial de 2025 est impossible à tenir, sauf à rétablir l’esclavage, dit-on dans l’entourage de la ministre écologiste. Il faudrait construite 18 km de métro par an. Même Shanghai, qui détient le record du monde [17 km/an], n’y arrive pas."
La proposition de Cécile Duflot à Jean-Marc Ayrault distingue trois types de lignes pour le futur Grand Paris Express. Le premier "paquet" consiste en une "rocade en zone dense" qui passerait, au nord, par Saint-Denis-Pleyel ; à l’ouest, par la Défense ; au sud, par Pont-de-Sèvres, Villejuif, Créteil ; et à l’est – c’est une nouveauté –, par Champigny, Rosny-Bois-Perrier, Bobigny… Cette ligne Rouge de "métrophérique de grande capacité" (quais de 120 m) pourrait être baptisée ligne 15.Le deuxième "paquet" concerne deux lignes existantes qui seraient prolongées : 1) la 14, jusqu’à Orly au sud, et jusqu’au Bourget RER au nord ; 2) la 11, au-delà de Mairie-des-Lilas, vers l’est, jusqu’à Rosny- Bois-Perrier, puis Noisy-Champs.Enfin, le troisième "paquet" comporte trois lignes "allégées" par rapport au projet initial : 1) la ligne Grand-Est, du Bourget-RER à Noisy-Champs, via Clichy-Montfermeil, en métro "à capacité adaptée" (avec des quais et des rames de 60 m) ; 2) la ligne du nord, du Bourget-RER au Mesnil-Amelot, via l’aéroport de Roissy, en métro léger partiellement aérien ; 3) la ligne Verte au sud, d’Orly à Versailles, via Saclay, en métro de surface léger, de faible capacité, type tram-train. Trois lignes qui pourraient porter les numéros "16", "17" et "18", pour mieux s’intégrer au réseau de métro existant.
Cette cure d’amaigrissement vise à faire des économies, chiffrées à 4 milliards. Le coût du GPE serait ainsi abaissé à quelque 26 milliards… qu’il reste à financer. Matignon doit trancher entre plusieurs propositions de financement, à commencer par le "déplafonnement" de la taxe Grand Paris. Duflot espère un engagement de l’État de 1 milliard d’euros qui permettrait d’optimiser l’emprunt. Des fonds européens pourraient aussi être sollicités. D’autres pistes sont envisagées, explique Yves Albarello : une augmentation de la taxe de séjour sur les hôtels parisiens, un prélèvement de 1 euro sur les 100 millions de billets d’avion vendus chaque année à Roissy et Orly, une hausse des amendes de stationnement…Le Medef-IDF s’insurge contre une nouvelle hausse de la fiscalité. La chambre de commerce et d’industrie (CCI) d’Île-de-France pronostique, elle, selon Le Figaro, une accélération de la croissance francilienne grâce au GPE : 2 % par an en 2015-2020, 3 % au-delà de 2030. Un gain de recettes fiscales chiffré à 60 milliards d’euros. Sachant que la région parisienne pèse un tiers du PIB national, Jean-Marc Ayrault ne prononcera pas à la légère son "discours historique".
Bertrand Gréco - Le Journal du Dimanche - dimanche 03 mars 2013
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La newsletter des élus d'opposition du groupe Mouvement populaire présidé par Valérie Pécresse : à lire pour mieux comprendre les enjeux de la région Ile-de-France.
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Ces extraits proviennent de l'interview publiée sur le site internet du JDD - http://www.lejdd.fr/JDD-Paris/Actualite/Pecresse-Nous-voulons-sauver-le-Grand-Paris-interview-593245.
- Vous venez d’adresser une lettre au Premier ministre à propos du Grand Paris Express.
- Ce courrier est cosigné par 50 parlementaires franciliens, dont François Fillon, Jean-François Copé, Patrick Devedjian, Patrick Balkany, Philippe Goujon, Henri Guaino, Christian Jacob... [...] Malgré nos différences, nous voulons tous sauver le Grand Paris, tel que l’a imaginé Nicolas Sarkozy. En tant qu’élus nationaux et franciliens, nous savons qu’il s’agit du seul projet d’avenir pour cette région et que l’ensemble du pays en bénéficiera. Le Grand Paris est le seul moyen de créer des emplois et de résoudre la crise du logement en Ile-de-France. Il faut absolument conserver l’objectif initial de 30.000 emplois et 70.000 logements par an.
- Que demandez-vous ?
- Nous voulons que le projet soit réalisé dans son intégralité et dans les délais prévus, c’est-à-dire terminé en 2025. Il est indispensable de boucler la boucle. Si on tronçonne le Grand Paris Express, il n’existe plus et ne permet plus de résoudre la saturation des RER. De même, il est crucial de desservir les aéroports, vitrines pour les touristes, les investisseurs. Vous exprimez votre "inquiétude" quant à la poursuite du projet… Il y a de quoi être inquiet : 16 gares sont menacées [sur 72], ainsi que 78 km de tronçons [sur 200 km], c’est-à-dire 40% du projet. Depuis le début, le gouvernement ne cesse d’envoyer des signaux négatifs. C’était déjà une provocation de nommer Cécile Duflot, ministre en charge du Grand Paris, alors qu’elle a été l’une des plus virulentes opposantes au projet. Elle a voté contre le Grand Paris au conseil régional. Puis, il y a eu la non-inscription du milliard d’euro dans le budget 2013. Depuis, ce ne sont que déclarations contradictoires. De nombreux spécialistes disent qu’il est impossible, même en Chine, de construire 200 km de métro d’ici 2025… Mme Duflot a déclaré qu’on pourrait démarrer toutes les lignes en même temps! Cela signifie donc qu’aux yeux du Gouvernement, c’est réalisable. On ne peut pas décaler la livraison à 2030, c’est un horizon trop lointain. Et que dire de 2040? On peut se projeter à 10 ans. Mais vous trouverez peu d’acteurs économiques qui envisagent leurs projets à 20 ans. De plus, tout retard risquerait de compromettre des projets d’envergure nationale comme le campus scientifique de Saclay ou le projet innovant de centre commercial et de divertissement EuropaCity, dans le Triangle de Gonesse, qui permettra de créer 12.000 emplois pendant sa construction et 12.000 emplois lors de son exploitation.
- Quelles sont vos "propositions innovantes"?
- On a deux principes : on reste à 2025 et contrairement aux socialistes on n’augmente pas les impôts car les Franciliens sont en overdose fiscale. Dès lors, comment fait-on pour financer le surcoût de près de 10 milliards d’euros? D’abord, on allonge les délais d’amortissement des prêts ; pour le métro parisien, on a mis près de 100 ans pour rembourser. On peut aussi mobiliser un emprunt auprès de la Banque européenne d’investissement (BEI). On peut également faire appel à l’épargne réglementée, c’est-à-dire aux fonds du Livret A, récemment déplafonné. Ces fonds destinés à la construction de logements ne sont actuellement pas dépensés. C’est l’arrivée du métro automatique qui va permettre de créer des logements. Il y a donc une logique à se tourner vers le Livret A.
- Quelles nouvelles ressources préconisez-vous, puisque que vous refusez toute recette fiscale supplémentaire?
- Les socialistes ont décidé d’augmenter la TVA sur les transports de 7 à 10% au 1er janvier 2014. Cela représente 100 millions d'euros par an. Cet argent pris aux usagers franciliens, je souhaite que le Gouvernement l’utilise pour réaliser le Grand Paris Express. Autre piste : puisque le Grand Paris est un investissement, un futur joyau pour l’Etat, on pourrait envisager, pour le financer, de céder d’autres actifs détenus par l’Etat. Le portefeuille des participations de l’Etat dans les seules entreprises cotées s’élève à 55 milliards d'euros. Bien sûr, il ne s’agit pas de toucher aux secteurs stratégiques pour la France, ni de mettre en péril des emplois. Pas question de céder des participations dans Renault. Mais en 2007, Nicolas Sarkozy avait vendu une partie du capital d’EDF (3,5 milliards d'euros) pour financer les campus universitaires. Nous nous inscrivons dans cette logique. Enfin, nous demandons que la région Ile-de-France finance le Grand Paris Express à hauteur de 100 millions d'euros par an. Où la région trouverait-elle une telle somme? Elle peut faire de nombreuses économies et les mobiliser pour le Grand Paris Express. Déjà, il faut dénoncer un scandale : l’Etat a transféré à la région des taxes pour financer la modernisation des transports (taxe sur les bureaux, redevance pour création de bureaux, relèvement des amendes, TIPP "Grenelle"). Mais la région n’utilise pas tout pour les transports : 51 millions d'euros sont utilisés pour autre chose. Je demande l’affectation intégrale de ces recettes aux investissements de transport. Par ailleurs, on peut réaliser des économies de 30 millions d'euros par an sur les organismes associés de la région. Enfin, je réclame le déménagement du siège de la région du 7e arrondissement vers une zone périphérique ; ce qui permettrait de faire 25 millions d'euros d’économies par an. Mises bout à bout, ces économies représentent environ 100 millions par an. Toutes ces mesures additionnées permettent de financer le Grand Paris sans nouvelles taxes.
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Rédigé à 15:04 dans Actualité, Courbevoie | Lien permanent | Commentaires (16)
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